Aller jusqu’à Singapour sans prendre l’avion ? C’est le pari qu’a relevé Benoît Bonjour, 24 ans, passionné de voyage et de train. À l’automne 2024, il quitte Paris avec un défi aussi ambitieux que symbolique : traverser l’Europe et l’Asie uniquement par voies terrestres, sans jamais décoller. Trains, bus, ferry, un soupçon d’impro, et surtout beaucoup de patience : une aventure intense qu’il partage aujourd’hui pour montrer que voyager autrement, c’est non seulement faisable… mais profondément enrichissant.
“J'aimerais simplement que les Français ouvrent les yeux sur les facilité de voyage dont on bénéficie en tant qu'Européen. Pouvoir d'achat, passeport…”
Pour relier Paris à Singapour, Benoît a traversé 17 pays à l’aller. Il a roulé vers l’est depuis la France jusqu’en Belgique, Autriche, Roumanie, Bulgarie, puis direction les Balkans et le Caucase. De la Turquie à la Géorgie, en passant par la Russie et l’Asie centrale (Kazakhstan, Ouzbékistan), il a ensuite rejoint la Chine, le Vietnam, le Laos, la Thaïlande, la Malaisie et enfin… Singapour.
L’itinéraire de Benoît sur Polarsteps
Pour le retour, il a emprunté un tout autre itinéraire via le Cambodge, la Chine et le Kirghizistan, avant de rentrer par les Pays baltes, la Pologne, l’Allemagne… et de retrouver la France.
Comme tu peux le voir, Benoît n’a pas emprunté l'itinéraire le plus court ni le plus rapide. Il précise qu'il est tout à fait possible de traverser la Russie “d’une traite” en quasiment 7 jours en utilisant le Transsibérien, de Moscou à Vladivostok en extrême orient (à la frontière chinoise et de la Corée du Nord, près du Japon). Pour autant, il insiste également sur l’intérêt de visiter les pays de l’Europe centrale, en particulier l’Ouzbékistan et le Kirghizstan.
En tout, son voyage sans avion a duré :
90 % du trajet s’est fait en train, le reste en bus, voiture et bateau, selon les contraintes locales (sécurité, visa, accessibilité).
© Benoît Bonjour
Le maître-mot pour Benoît ? Anticiper. « Comme pour un entretien d’embauche ou pour un examen, tout est une question de préparation ». Le jeune voyageur a ainsi méticuleusement indiqué tous les points d’intérêt de chaque pays asiatique sur Google Maps, en s’inspirant de vidéos de voyageur, de livres de voyage ou encore de livres historiques. Il a ensuite étudié les conditions d’accès à chaque pays en matière de Visa, grâce au groupe de Français qui voyagent en bas carbone “Alibi”. « Je n’avais pas envie de me retrouver bloqué à la frontière Kazak parce que je n’avais pas le bon visa ! »
Benoît a dépensé environ 10 500 € pour ce voyage de plusieurs mois, soit l’équivalent d’un SMIC mensuel ramené à la durée de l’aventure. Un exploit budgétaire quand on sait qu’il a traversé une bonne partie du monde.
Son secret ? Une approche minimaliste, mais riche en expériences :
Il a limité les attractions touristiques coûteuses, tout en explorant à fond chaque destination.
Le détail du budget de Benoît - © Benoît Bonjour
Et le détail du coût du trajet dans tout ça ? Côté transports, tiens-toi bien :
Soit un total de 2933 € de transport.
Benoît met gentiment à disposition son tableau de budget complet, avec toutes ses dépenses détaillées pays par pays, classées par poste de dépense : transports, hébergements, nourriture, activités…
Le détail par pays - © Benoît Bonjour
Un outil plus que précieux pour celles et ceux qui veulent s’inspirer de son aventure et préparer leur propre voyage sans avion :
Plus qu’un enchaînement de destinations, ce voyage est avant tout une aventure humaine. À travers les anecdotes qu’il partage, on découvre une mosaïque d’émotions, d’imprévus… et de surprises inoubliables.
En Chine, Benoît découvre des trains de nuit ultra modernes, avec des wagons spacieux, des restaurants à bord, et même sur la ligne Shanghai–Hong Kong « des chaussons, une trousse de toilette avec peignes, brosses à dents, dentifrice, et une boxe avec des gâteaux et de quoi manger… que demander de plus ? »
À Chongqing, la gare est si grande qu’elle rivalise avec un aéroport. À bord : « les restaurants sont excellents, 5 prises électriques par wagon, c’est la guerre pour en avoir une. » Quitte à se faire voler sa batterie par un contrôleur indélicat…
« Les trains de nuit chinois, véritables hôtels roulants, m’ont permis de découvrir des villes tout en avançant sur le plus grand réseau ferré au monde, passer de la mégalopole à la montagne. »
Les trains de nuit en Chine - © Benoît Bonjour
Autre souvenir marquant : le ferry-train entre Guangzhou et l’île de Hainan, où le train embarque… sur un bateau, comme c’est aussi le cas en Sicile.
Mais tous les trajets n’ont pas été de tout repos. Entre les galères de visa (« J’ai été refoulé à la sortie de la Chine, car je n’avais pas de VISA. J’ai donc perdu du temps et de l’argent car j’ai dû franchir une autre frontière, et reprendre un billet de train. »), les applications en chinois sans traduction, les trains interdits aux hommes et femmes seuls dans la même cabine, et même un interrogatoire de 1h45 par la police chinoise après une discussion politique imprudente… Benoît n’a pas été épargné. Sans parler du jour où, en Thaïlande, des singes ont fouillé son sac pour y voler des chips… et ont fait tomber son passeport dans l’eau, à 48 heures d’un passage de frontière.
« Une fois, un ticket était disponible, c’était la classe la plus luxueuse à 50 € le train, deux par cabine. J’étais tout contentn jusqu’à ce qu’on m'annonce qu’il était impossible mixer un homme et une femme dans la même cabine… Évidemment, c’était une femme donc je n’ai pas pu le prendre. »
Malgré tout, il garde le sourire. Car ces mésaventures font partie intégrante du voyage. Et elles sont souvent le prélude à des rencontres incroyables, comme cette famille ouzbek qui l’a aidé à obtenir un visa Schengen en envoyant une lettre d’invitation par DHL depuis Samarcande !
© Benoît Bonjour
Plus que le défi technique ou la performance logistique, ce voyage est pour Benoît une expérience fondatrice. Voyager sans avion, c’est accepter de ralentir, de s’adapter, de rencontrer l’autre. C’est aussi mieux comprendre les inégalités d’accès à la mobilité et le privilège que représente un passeport européen.
Son message est simple : un autre imaginaire du voyage est possible. Loin des hubs aéroportuaires, le rail reste une formidable porte d’entrée sur le monde.
Pour découvrir l’intégralité du périple de Benoît, rendez-vous sur son Polarsteps !
Issue du monde de la communication et des médias, Sophie est Responsable éditoriale chez HOURRAIL ! depuis août 2024. Elle est notamment derrière le contenu éditorial du site, la page Linkedin du média, ainsi que La Locomissive (de l'inspiration voyage bas carbone et des bons plans, un jeudi sur deux, gratuitement dans ta boîte mail !).
Convaincue que les changements d’habitude passent par la transformation de nos imaginaires, elle s’attache à montrer qu’il est possible de voyager autrement, de manière plus consciente, plus lente et plus joyeuse. Son objectif : rendre le slow travel accessible à toutes et tous, à travers des astuces, des décryptages et surtout, de nouveaux récits.