Même quand on a conscience de l’urgence climatique, difficile de ne pas se décourager devant l’écart de prix - parfois vertigineux - entre le train et l’avion. Mais alors, pourquoi l’avion est-il moins cher que le train (alors qu’il est jusqu’à 70 fois plus polluant pour un Paris-Barcelone et que, d’après le dernier rapport du Haut conseil pour le climat, nos émissions dues aux transports devraient baisser 4x plus vite) ?
Prix artificiellement bas de l’aérien, niches fiscales, structure de coûts désavantageuse pour le ferroviaire, offre de train moins développée… Le dernier rapport du Réseau Action Climat revient sur les raisons de ce on-sens climatique et économique et propose des solutions concrètes.
D’après les données de l’UFC-Que Choisir et de Greenpeace Central and Eastern Europe sorties il y a quelques jours, la situation n’est pas tout à fait la même sur les lignes françaises et sur les lignes européennes.
Sur les rails français, la situation est contrastée. Le train est moins cher que l’avion (-40 % moins cher) lorsqu’il existe un TGV ou un train INTERCITÉS direct entre deux villes. Mais il devient plus cher que l’avion (+12 % plus cher) dès lors qu’il faut faire une correspondance. Un constat qui va dans le sens du retour de liaisons directes entre les régions de l’hexagone.
© Rapport du Réseau Action Climat “Pourquoi l’avion est (souvent) moins cher que le train ?” - 2025
Sur les liaisons européennes, en revanche, le constat est beaucoup moins nuancé : le train est en moyenne 2,5 fois plus cher que l’avion (”en pondérant avec le nombre de passagers aériens pour avoir une vision la plus juste possible”, comme l’explique Alexis Chailloux, du Réseau Action Climat). Et sur les liaisons les plus fréquentées (comme Paris-Milan ou Paris-Copenhague), le train est jusqu’à 3 à 4 fois plus cher ! Concrètement, les billets d’avion à 15-20 € ne sont pas rares, là où les billets de train dépassent souvent les 100 €.
© Rapport du Réseau Action Climat “Pourquoi l’avion est (souvent) moins cher que le train ?” - 2025
Pour comprendre cette aberration, il faut comprendre que l’avion bénéficie d’importants avantages fiscaux par rapport au train :
Sur le trajet Paris-Barcelone, ces exonérations coûtent à l’État entre 30 et 40 € par passager.
De l’autre côté, sur la même ligne Paris-Barcelone, les redevances que payent les trains pour circuler sur le réseau représentent plus de 50 % des coûts de la SNCF !
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Notons également que compagnies low-cost qui réduisent leurs coûts (notamment en rognant sur les conditions de travail), et le manque d’offre de trains à grande vitesse à l’international. Par exemple, pour le trajet Paris-Barcelone, la SNCF n’offre aujourd’hui que 1000 places par jour (2 rames simples), contre près de 8000 pour les compagnies aériennes.
© Rapport du Réseau Action Climat “Pourquoi l’avion est (souvent) moins cher que le train ?” - 2025
Dans son dernier rapport, le Haut conseil pour le climat alerte sur la politique climatique actuelle de la France. Alors qu’une vague de chaleur vient de frapper le pays, le constat est sans appel : nous devrions baisser nos émissions au moins 2x plus vite pour atteindre les objectifs fixés pour 2030. Quant à nos émissions dues aux transports (34 % des émissions françaises), il faudrait les faire baisser 4x plus vite !
Alors que la SNCF a tiré la sonnette d’alarme (la France doit investir un milliard d’euros supplémentaire par an dès 2028 pour éviter l’effondrement du rail français), il est urgent que le gouvernement français s’empare du sujet.
Selon le Réseau Action Climat, l’État pourrait mettre fin aux niches fiscales aériennes dès 2026 :
Une décision qui permettrait de générer plus de 3 milliards d’euros pour :
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Comme le conclut Alexis Chailloux, responsable Transports au Réseau Action Climat, dans cet excellent article publié sur le média Bon Pote : “Autrement dit, l’écart de prix entre les billets d’avion et de train n’est pas une fatalité qui viendrait de traités internationaux ou d’une différence structurelle de coût entre les modes de transports. Il s’agit d’abord de résultats de décisions politiques (le maintien des niches fiscales en faveur de l’aérien, l’absence de subvention pour le TGV en France) qui peuvent être modifiées par… d’autres décisions politiques plus favorables au climat.”